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Buts de l'entreprise

But des entreprises = faire bénéfices. Ce but, s'il est pris en soi, est absurde ; l'argent n'ayant aucune valeur en soi (si chaque génération accumule de l'argent pour la suivante, personne n'en profite : l'argent a disparu). Cet argent n'a de valeur que par rapport au bonheur qu'il peut procurer. Si but = bonheur des propriétaires de l'entreprise, alors ceci = théorie sociale de l'anarchie ; et une société se doit de forcer les individus qui la composent à coopérer. Si but = bonheur général (d'un État, d'une région ...) = seul but possible de toute organisation sociale, alors les profits doivent être redistribués, ou bien réinvestis pour faire plus de profits destinés à être redistribués (même si les dividendes s'apparentent à une redistribution récompensant l'apport de capital, plus rare que l'apport de travail, les dividendes sont alors une rémunération du capital comparable à une rémunération du travail, dont on voit mal le rapport avec un droit de vote au conseil d'administration).

Si augmentation des profits par baisse des coûts sans augmentation du chiffre d'affaires, ceci = pas croissance de l'entreprise, pas création de biens ou richesses nouveaux et par ailleurs baisse de la distribution des profits -> aberrant (sauf si momentanément, économies indispensables à la survie de l'entreprise).

Argument que les salariés n'ont pas à diriger l'entreprise (à participer au conseil d'administration ) car leur échange avec l'entreprise est limité à "travail pour salaire". Mais même principe pour les actionnaires : échange = "investissement initial (apport de capitaux) pour dividende". Le dividende jouant le même rôle qu'un salaire, pourquoi un apport de capital donne-t-il droit à un contrôle et pas un apport de travail ? Si l'apport de capital donne un contrôle moral sur ce qui est fait de ce capital, l'apport de travail doit donner le même contrôle moral sur ce qui est fait de ce travail. Il est impossible de supprimer le contrôle des actionnaires sur la gestion de l'entreprise car alors les dirigeants seraient irresponsables (sauf devant l'État pour une entreprise nationalisée). Donc : tout ce qui apporte la prospérité à l'entreprise (actionnaires, salariés, mais aussi entreprises de sous-traitance et clients ["le client est roi" -> pas contradictoire avec les théories capitalistes classiques, mais actuellement le client n'a pas le pouvoir d'influence sur l'entreprise qu'il devrait, cf. remarques sur la concurrence qui ne joue pas toujours dans Contre l'ultralibéralisme]) doivent avoir un droit de contrôle. D'autre part, les salariés sont probablement autant (ou aussi peu ?) capables d'une bonne gestion que les actionnaires, car leurs intérêts sont généralement ceux de l'entreprise à long terme, alors que les actionnaires n'ont aucun intérêt commun à long terme avec les entreprises et les décisions qu'ils font prendre ne sont pas forcément les meilleures pour l'entreprise. Si on répond que les salariés sont incompétents, dans l'exercice de la démocratie les citoyens sont encore moins compétents pour diriger un État. -> le système de direction d'une entreprise devrait être strictement calqué sur le système de gouvernement du pays (si un jour on trouve moins mauvais que la démocratie, il faudra aussi appliquer ce système à la gestion des entreprises).

Il semblerait que les aspirations des salariés soient plus contradictoires que celles des actionnaires : d'une part, volonté d'augmentation du salaire et d'amélioration des conditions de travail (= paresse ?), et d'autre part, profit maximal pour que l'entreprise survive (réinvestissement) et continue à l'avenir à verser les salaires. Mais les actionnaires sont dans la même situation : 1) intérêt immédiat à l'augmentation du dividende (comparable à l'augmentation de salaire) 2) intérêt à ce que l'entreprise survive pour continuer à verser des dividendes. Donc : intérêts exactement parallèles à ceux des employés (rémunération du capital/du travail), à ceci près que les actionnaires, plus enclins à la spéculation, peuvent rapidement se débarrasser du capital qu'ils possèdent dans l'entreprise (les salariés sont moins mobiles) et donc l'intérêt 1) joue plus (mauvais pour l'entreprise)[en particulier, les actionnaires peuvent vouloir freiner l'investissement].

Autre intérêt des actionnaires en plus du dividende : la perspective de plus-value à la revente, qui détermine le cours de l'action. Mais ce cours est déterminé non par la valeur intrinsèque (éventuellement anticipée) de l'entreprise, mais par les perspectives de plus-value à la revente : si l'idée de moins-value domine, tous les cationnaires devraient revendre, et le cours d'équilibre de l'action serait probablement négatif. Ceci est évidemment tempéré par la notion intuitive de la valeur de l'entreprise et par les versements de dividendes, mais ces deux facteurs interviennent dans la fonction d'utilité des agents, pas dans les mécanismes de fixation des prix qui, eux, mènent bien à évaluer l'entreprise non en fonction de sa valeur mais en fonction des perspectives de plus-value, qui peuvent être des moins-value.

On peut répondre que les salariés sont plus pressés par le manque d'argent et l'intérêt à court terme, tandis que les actionnaires (plus aisés et aussi plus réfléchis) sont mieux capables de se tenir à leur intérêt à long terme. Mais ceci est un facteur aggravant car justement leurs intérêts à long terme divergent de ceux de l'entreprise ; et d'autre part des actionnaires comme les autres sociétés peuvent, comme les salariés, avoir un besoin urgent de fonds.

De plus, un pouvoir de décision est une possibilité d'arbitrage en sa propre faveur (dans un CA, on vote plus dans son intérêt que pour l'intérêt abstrait de l'entreprise). Accorder un pouvoir de décision à certains et pas à d'autres introduit donc toujours des biais, ceux qui ont le pouvoir étant plus en mesure de réussir (à gagner de l'argent) [les actionnaires peuvent s'attribuer les dividendes sans augmenter les salaires]

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